Thérapie émotionnelle

Dynamique Emotionnelle Exprimée, thérapie de groupe et individuelle – Paris, Lyon

Comment soigner une phobie en passant par les émotions ?

Cas clinique : Géraldine

Notre patiente, Géraldine, croise dans les sous-bois où elle a l’habitude de faire du jogging, un ami proche. Celui est accompagné par sa petite amie. Notre patiente ne s’en émeut guère. Elle se sent bien, elle leur dit bonjour en poursuivant sa route, tranquille.

Mais quelques jours plus tard, et sans en comprendre la raison, elle n’arrive plus à courir, sportive qu’elle était, dès qu’elle s’engage dans le bois : elle en prise par des peurs qui confinent à la phobie : dégout, sensation de nausée, jusqu’à des vertiges. En séance, elle associe dans son discours les deux évènements, mais elle-même ne fait pas de lien entre eux. Elle ne comprend pas la peur qui l’étreint : de la peur ? Pour quelle raison ? Elle n’en voit aucune… La jalousie ? Elle sait qu’il ne s’agit pas de cela.

Nous allons lui proposer de travailler les éléments qu’elle apporte, par ordre d’apparition : « j’ai peur, « je n’ai plus envie », « ça m’angoisse »,… Son émotion n’est liée à aucune représentation précise et en cela elle est ressentie comme angoisse.

Puis notre patiente fait une première association : quelques jours après la rencontre dans les bois, son ami lui a déclaré textuellement que la relation avec elle ne l’intéressait plus. Il rompt ainsi une relation d’amitié forte qui durait depuis des années. Devant la jalousie maladive de sa nouvelle amie, il a décidé de cesser toute relation avec ses anciennes connaissances féminines, dont elle faisait partie. Et c’est depuis cette déclaration, lorsqu’elle a voulu retourner dans les sous-bois, qu’elle a commencé à présenter les différents troubles.

Première relation de cause à effet qui remonte à la conscience.

Nous lui proposons de poursuivre sur la tristesse qu’elle ressent d’avoir été « lâchée », selon ses propres termes : « je suis triste que tu me laisses, je t’en veux, tu me lâches, ça me fait de la peine » puis elle arrive à la peur « j’ai peur » répète-t-elle, d’une voix forte... » Elle s’interroge sur cette peur. Nous lui proposons de l’explorer grâce à différents mantras.

C’est ainsi qu’elle va passer de la tristesse d’être lâchée par son ami à une peur d’abandon, qui résonne anachroniquement de par le fait qu’elle est indépendante et ne semble pas se faire dépendre de lui, une peur qui va vite se révéler archaïque, ancienne.  Et qui coïncide à son histoire personnelle dans ce que nous en savons, fille d’une mère non aimante et d’un environnement peu sécurisant. Dans cette rupture actuelle se répète une situation traumatique initiale d’abandon dont il n’y a jamais eu de représentation claire, ni de souvenir précis dans la mesure où les affects qui y sont encore liés remontent d’une époque où la mémoire n’était pas possible du fait même de l’immaturité du cerveau, et du danger que la conscientisation de ces représentations comportaient pour le nourrisson…

Qu’est ce qui nous a permis de subodorer la cause primitive de la peur chez notre patiente sans nous confiner à ses premiers apports ?

Géraldine ayant explorée la peur au plus profond, comprend que sa phobie, cette peur, les angoisse naissantes, n’ont d’autre objet que la peur abandonnique auprès d’une mère qui coupait toute relation avec le petit enfant qu’elle était, lui préférant le père, avant toute construction œdipienne, c’est-à-dire avant que l’enfant ne puisse accepter la frustration. Cette peur d’abandon se pose sur un homme, un ami, bien qu’il s’agisse d’un problème lié à la mère, car quoi de plus intime au niveau relationnel pour une femme, qu’un homme, après celle que fût celui avec la mère…

Ne plus réussir à aller courir lui permettrait d’éviter d’actualiser les réminiscences d’une situation traumatisante par une inhibition. Le moi « déclenche un signal d’angoisse avant même que la perturbation économique n’ait eu lieu. Cette transformation a la valeur d’un important progrès pour l’autoconservation et permet le passage d’une angoisse automatique à une angoisse protectrice comme signal de danger. Finalement, l’angoisse est un signal qui incite à éviter la situation de danger, la condition déterminante étant la perte de l’objet »[1]

Il ne s’agit donc pas de parler pour être libéré d’un trauma, il s’agit de mettre en parole un événement en allant chercher l’émotion qui y était liée mais interdite de souvenir, remise alors en mouvement grâce à cette parole. En ce qui nous concerne, notre travail est d’aller puiser au plus profond du psychisme pour faire advenir cette émotion, qui parfois n’a pas même eue lieu. La mantrathérapie […] permettant à l’affect coincé de se déverser verbalement […] amène cette représentation à se modifier par voie associative en l’attirant dans le conscient normal […].[2]

Ici se joue le lien entre traumatisme, émotion, représentation et verbalisation.

« Un souvenir dénué de charge affective est presque totalement inefficace »[3] 

La réapparition de l’affect est primordiale. C’est à travers elle que se recréera la liaison affect/représentation amenant alors à l’abréaction par la parole, puis à la décharge émotionnelle de l’affect jusqu’ici scellé. La décharge émotionnelle en libérant l’affect lié aux souvenirs d’un traumatisme jusqu’alors refoulé, annule les effets pathogènes.

[1] Sigmund Freud, Id. P.3

[2] Cf. Freud Etudes sur l’hystérie–§V p.12 2002 PUF 1975

[3] Cf. André Green, le Discours vivant, p.29, citant Freud, PUF, 1ere Ed. Quadrige 2004

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